Dis moi quelque chose de gentil

« Dis moi quelque chose de gentil…. »

« Gentil »

« Je te déteste »

Je revenais à la charge…. « Dis moi quelque chose de gentil »

« Euh…t’es belle »

« Je m’en fout de mon physique. C’est tout ? »

« Ca ne se prononce pas sur commande »

« Je demande parce que tu n'exprimes jamais rien »

« Mais si je t’en dis tout le temps des choses gentilles »

« Ah oui ? Désolée préciser ce matin que ce jeans met mes fesses en valeur, ce n’est pas vraiment ce que j’espérais de la part de mon amoureux »

« Je suis fatigué, dors »

Non, il ne faudrait pas demander.
Les mots d’amour devraient être source intarissable, claire, bouillonnante, torride, tendre, folle, désespérée.
Ils devraient être présents chaque instant, rassurants, protecteurs, enthousiastes.
Sécurisant une âme toujours inquiète de tant d’amants perdus.
Optimistes pour ce jour et ceux à venir.
Prometteurs d’avenir.


Yves SIMON « Sorties de nuit » 1995

Elle demanda : « Un mot d’amour s’il te plaît. Dis-moi à cet instant un mot d’amour ». Il dit : « Je tiens à toi ». « Moi, je tiens à cette montre que m’a offerte mon père, je tiens à un mouchoir qu’à brodé à mes initiales ma grand-mère avant de mourir » dit-elle.
Il tourna la tête et lui serra la main.
Une échappatoire, pensa-t-elle, une de plus. Pourquoi les hommes ne prononcent –ils pas les mots que l’on veut entendre ?
Ont-ils peur du temps qui semble assigné à ces mots ? Est-ce que je pense le temps comme lui ? se demanda-t-elle encore et conclu ainsi sa pensée : nos horloges internes ne sont pas identiques.
Amusée par l’enchaînement secret de ses pensées, elle dit soudain : « Tu as l’heure ? ». Il regarda tranquillement sa montre : « Six heures dix ».
« A six heures neuf, tu aurais dû me dire que tu m’aimais. Souviens-toi de ça mon vieux ! ».
Elle s’élança vers l’escalier du métro et disparut.