mercredi, décembre 02, 2009

Ce soir tu as lâché prise. La lassitude s’est alliée au découragement. La rareté de tes mots, m’ont fait comprendre la permanence des maux. Tu es allé jusqu’au bout de la souffrance, là on ne revient que fou.

Nous sommes entrés dans l’Histoire, mais ce ne fut que la notre.
Quelle improbable rencontre, quel exceptionnel parcours de l’artiste trop sensible et du philosophe géométrique.
Celle qui croyait en Dieu, celui qui n’y croyait pas.
Cette chanson que je ne pensais pas prémonitoire « Voir un ami pleurer ».
Martin et Hannah.
Strasbourg et Bâle.

Ma vie contre la tienne. Blottie tout contre. Construite dans l’unique but de cette admiration réciproque, cet amour qui jamais n’a cessé, tu as enchanté ma vie.

Aujourd’hui le pilier sur lequel j’ai bâti la maison Eve se fissure, vacille et menace de disparaître.
Trop tôt pour avoir assez de force à vivre sans toi.
Qui d’autre pourrait m’aimer autant que toi ?

Je ne serais pas devenue. Pas sans toi, à quoi bon aimer, vivre, peindre sans la permanence de ton regard ? Les morceaux de vie ordinaires crées pour toi se tairont à jamais.

Plus personne ne me racontera une histoire.

Ma fondation unique, ma plus grande force, ma plus belle faiblesse.

Tu m’as accordé le droit de mourir par amour mais c’est encore plus que cela. A l’instant exact où tu ne seras plus, mon existence que tu as révélée au monde disparaîtra avec toi.

Ce texte date d’il y a 4 ans et jamais il n’a cessé d’être vrai :

Dis raconte moi une histoire :


Celui à qui j’adresse cette demande, est assis sur le canapé de mon appartement, il n’est ni mon père, ni un enfant, ou un frère, il est mon amoureux.

Un amoureux tout neuf, que je ne connais que depuis quelques jours. Il ne sait pas encore quoi faire de ses mains, ni de son corps, même ses yeux bleus m’évitent.

Ils sont si maladroits au début ces presque amants, anxieux, craintifs, juste avant que leur nature de conquérant prenne le pas sur cette timidité si charmante qui marque les tout débuts des relations amoureuses.

Combien de fois ai-je demandé à mes amoureux de me raconter une histoire ? Combien de fois m’a t’on répondu, en confondant ma demande avec celle d’une histoire humoristique « Je ne n’en connais pas ou je ne sais pas les raconter ? «
Et quand je m’exprimais un peu plus précisément, l’incompréhension était encore plus grande.
Quoi une histoire à ton âge ? Mais laquelle ? Une histoire de conte de fée que tu connais déjà ?
Ils avaient oublié qu’on pouvait sortir de Grimm, d’Andersen, et pour eux le Petit prince n’était qu’un enfant égoïste qui s’amusait à déranger les fleurs, les animaux et les grandes personnes.
Non, une histoire commence par « il était une fois » sinon cela serait tricher et ne se termine pas, mais absolument pas, par « ils se marièrent est eurent beaucoup d’enfants « car elle serait alors une histoire de quotidien. Le quotidien qui est l’ennemi du rêve, de l’absolu, de la passion.
Comment concilier la demande incongrue d’une adulte dans des vies où il n’y a plus d’horloges pour égrener bruyamment le temps, où les cheminées ne servent plus à réchauffer, où la vacance du dimanche est réservée aux tâches du quotidien, aux repas familiaux, aux films vus dans des salles bondées ?

Je posais donc une nouvelle fois cette question, avec appréhension, d’abord le plus urgent, le plus indispensable : l’histoire.

Il ne me demanda aucune précision, ne se fourvoya pas dans une histoire drôle, et me raconta ce que je voulais entendre, un récit amoureux, triste et grave comme est la vie quand elle est sublimée. Qu’importe son contenu ? Sachez seulement qu’elle fût belle, que je fus émue et que portée par ses mots, je me trouvais aussi proche de lui que si nous faisions plus qu’un. Il partageais avec moi son imaginaire, son monde, sa rêverie était mienne. Je l’aimais, oh si vous saviez combien je l’aimais à cet instant précis.


Le lendemain, je réitérais ma demande. Persuadée qu’un miracle d’une telle force ne pourrait pas se renouveler.

Sans plus de questions que la veille, il accéda encore une fois de bonne grâce à ma requête. L’histoire du jour était fort différente de la veille, c’était notre aventure débutante qui était mise en scène, fable d’un sentiment naissant mais qui avait déjà la force et la profondeur des amours mythiques.

J’avais trouvé mon faiseur de rêves. Qu’importe la télévision, les films, et même la plupart des livres, si on a la chance de pouvoir vivre auprès d’un conteur d’histoires ?

Quel ennui peut naître dans un couple, si l’un au moins, sait transcender la réalité, si ce pouvoir extraordinaire d’invention qui existe dans toutes les enfances, même les plus malheureuses, perdure encore à l’âge raisonné à défaut d’être raisonnable ?

Prendre le temps d’inventer, non pas pour l’honneur, la célébrité ou la gloire (mais qu’y a t’il de plus prestigieux qu’une écoute amoureuse quand elle est fusion ?), pour une seule personne devenue unique, sans espoir d’être publié, créer une œuvre éphémère, instantané de vie.

Pour le réel plaisir de raconter et d’être entendu. En face de moi, tout près, se tenait donc l’extra terrestre, le plus qu’humain que j’avais passé ma vie à chercher. En m’offrant cet acte gratuit, en occupant l’espace et le temps, de tout son être, cet homme m’avait fait le plus beau des cadeaux.

C’est peut être rien pour vous, rien qui se porte, rien qui brille, qui sente bon, qui se prenne en photo et que l’on puisse montrer à autrui.

Je reste près de lui, je ne ferme pas les yeux mais je ne suis qu’écoute et rien ne s’approchera plus de la notion si subjective de bonheur que les moments passés auprès de cet homme à l’imaginaire débordant.

La petite fille à trouvé son père, l’enfant unique son frère, la femme son idéal.

Mon bonheur, son bonheur aussi, je le touche du bout des doigts quand je prends sa main, et il recommence à chaque fois que j’entends cette phrase magique « Il était une fois… ».

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